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Carnets de voyage

Caro au pays du Che

Les façades colorées du quartier historique et populaire de la Boca.
Les façades colorées du quartier historique et populaire de la Boca.
Photo : Caroline Dufour

6 novembre 2008

Caroline Dufour, étudiante au baccalauréat en droit

Le 25 juillet, j'arrivais en terre argentine. Je la surnomme «pays du Che» non seulement parce que le célèbre Che Guevara y est né, mais aussi parce que pratiquement chaque phrase débute par «che!», mot dont la seule utilité est d'attirer l'attention, dans la même veine que notre «eh!» québécois. Le but principal de ce séjour de cinq mois à l'autre bout des Amériques était bien sûr d'y effectuer une partie de mes études en droit au sein de la Pontificia Universidad Católica Argentina. Toutefois, en m'installant dans l'immense capitale qu'est Buenos Aires, j'avais un second objectif bien ancré dans mon esprit : découvrir la culture argentine, entre autres en m'imprégnant de l'effervescence qui règne dans un stade de fútbol, en admirant la sensualité qui se dégage des pas de tango, et en me familiarisant aux règles implicites entourant la prise du maté, une infusion très prisée en Amérique latine.

Voilà le printemps!

L'image du révolutionnaire Che Guevara, médecin originaire d'Argentine, demeure «toujours dans le cœur des peuples», indique cette affiche.
L'image du révolutionnaire Che Guevara, médecin originaire d'Argentine, demeure «toujours dans le coeur des peuples», indique cette affiche.
Photo : Caroline Dufour

À mon arrivée à Buenos Aires, j'aurais eu de la difficulté à croire que j'étais en Amérique du Sud si ce n'avait pas été des palmiers qui parsèment la ville ici et là. Les journées étaient froides, venteuses, plutôt maussades, et la nature s'était visiblement endormie le temps d'un hiver. J'aurais juré être au Québec en automne, si on exclut les manifestants qui descendent presque quotidiennement dans les rues pour exprimer leur mécontentement face au gouvernement de Cristina Kirchner. Heureusement, dans l'hémisphère sud, c'est la chaleur qui se pointera le bout du nez bientôt et non l'hiver. Alors que le Québec est enseveli sous les feuilles mortes, Buenos Aires semble reprendre vie. En effet, avec ses parcs chaque jour plus verdoyants, ses terrasses animées jusqu'aux petites heures du matin et un soleil de plomb, nul doute que la belle saison est à nos portes. La Plaza de Armas a bien meilleure mine et les pigeons doivent maintenant cohabiter avec des dizaines de Porteños (habitants de Buenos Aires) qui vont s'y allonger sur l'heure du dîner. Mais vaut mieux se méfier de ce soleil si invitant, car 15 minutes peuvent suffire à vous donner un bon coup de soleil. On est bien loin du soleil du Québec! Et bien que l'été ne débute que fin novembre, nous voilà déjà à des températures frôlant les 30 degrés, sans oublier l'humidité très élevée, qui exaspère les Porteños les plus endurcis.

Au rythme des Porteños

Caroline enlace un cactus du parc Ischigualasto dans la province de San Juan.
Caroline enlace un cactus du parc Ischigualasto dans la province de San Juan.

Évidemment, le dépaysement ne se limite pas à la langue et au climat, mais s'étend aussi à la vie académique. Même si l'université dans laquelle j'étudie est privée, le cadre universitaire de sa faculté de droit n'est assurément pas aussi rigide que celui de l'Université de Sherbrooke. Ici, qu'un professeur arrive avec 30 minutes de retard et termine le cours 30 minutes à l'avance n'est pas exceptionnel. Il faut dire que le manque de ponctualité fait partie intégrante de la culture argentine… et j'y prends drôlement goût.

Je prends aussi goût au rythme des Porteños, même si mon horloge biologique québécoise sonne à 3 h du matin pour me rappeler qu'il est temps de se mettre au lit. À l'heure où la majorité des Québécois se glissent sous les couvertures, la soirée ne fait que commencer à Buenos Aires. Ce n'est pas très surprenant sachant que les Argentins soupent habituellement vers 22 h. De plus, il est impensable de se rendre en boîte avant 2 h de la nuit, où les rythmes internationaux et latinos se mélangent pour faire danser les Argentins jusqu'à 7 h du matin, heure de fermeture des discothèques et bars. Je ne vous cacherai pas que cela nécessite une période d'adaptation! Cette ville qui rassemble 13 millions d'habitants au total grouille à toute heure du jour et de la nuit. Elle ne semble s'arrêter que le dimanche, journée où presque tous les commerces sont fermés. C'est une journée réservée au bon temps en famille, aux asados, aux longues promenades dans les nombreux espaces verts de la ville, sans oublier les conversations animées qui se prolongent autour d'un maté. Car les Argentins sont des gens très sociables, qui adorent converser et surtout débattre. En fait, ils ont une opinion sur absolument tout, même sur ce qu'ils ne connaissent pas, et font preuve d'une facilité déconcertante à critiquer la république argentine. Ici, l'expression «le gazon est toujours plus vert chez le voisin» prend tout son sens.

Il ne reste maintenant qu'un mois d'études mais non le moindre! À l'approche de la fin de session, une partie de moi ressent un mélange de soulagement et de fierté d'avoir su relever le défi d'étudier dans la langue de Cervantes. D'un autre côté, j'aimerais que cette session s'éternise pour pouvoir flâner encore de longues heures dans Buenos Aires, savourer ses alfajores (pain d'épice) et écouter l'accent coloré des Argentins. Mon retour au Québec sera teinté de nostalgie, mais je me console toutefois en me disant que personne ne pourra m'enlever les souvenirs de cette formidable expérience. Oh, mais ne vous en faites pas, j'y reviendrai. Je ne sais pas quand, mais j'y reviendrai…